Article N° 8195

Autisme - Paracétamol

Le paracétamol, l’autisme et la politique !

Abderrahim Derraji - 27 septembre 2025 09:27
Donald Trump est connu pour ses déclarations choc. Mais en affirmant, lors d’une conférence qui s’est tenue lundi dernier, qu’un lien existerait entre la prise de paracétamol pendant la grossesse et l’autisme, il a déclenché une tempête bien au-delà des frontières américaines. Le président américain a même annoncé vouloir modifier les recommandations de la FDA et déconseiller ce médicament au premier trimestre de grossesse, sauf en cas de forte fièvre. Un point de vue que soutient son ministre de la Santé, Robert Kennedy Jr., connu pour ses positions controversées sur la vaccination.

L’Association américaine des gynécologues, tout comme l’Organisation mondiale de la santé (OMS), remettent en question les propos du président américain en rappelant qu’aucune étude sérieuse n’a démontré de lien de causalité entre l’utilisation prudente du paracétamol et les troubles du développement. Au contraire, les études les plus robustes, menées en Suède et au Japon, montrent que lorsque les facteurs socio-économiques et familiaux sont correctement pris en compte, le lien entre le paracétamol et l’autisme disparaît.

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM, France) a rappelé dans un point d’information du 25 septembre que les nombreuses données portant sur les femmes enceintes ne montrent pas de risque de toxicité fœtale ou néonatale, que ce soit chez le fœtus en développement ou chez le nouveau-né. Elle précise toutefois qu’en cas de besoin, le paracétamol doit être utilisé à la dose efficace la plus faible, pendant la durée la plus courte possible et avec la fréquence la plus réduite possible.

Pourtant, dans la même conférence, Trump a vanté les mérites de la leucovorine dans la prise en charge de l’autisme. Il a présenté ce traitement utilisé en oncologie comme une piste thérapeutique. Certes, de petites études exploratoires ont montré des améliorations du langage chez certains enfants, mais les chercheurs ne peuvent préconiser ce traitement qu’après l’avoir valider par des essais cliniques de grande ampleur. Malgré cela, la Maison-Blanche presse déjà la FDA de reconnaître son potentiel.

Cette manière de court-circuiter la science inquiète profondément la communauté médicale, qui craint que des femmes enceintes renoncent à traiter une fièvre ou une douleur, mettant ainsi leur santé et celle du fœtus en danger. Elle redoute également que des parents d’enfants autistes se tournent vers des traitements non validés, au détriment de prises en charge éprouvées. Plusieurs experts dénoncent une approche avant tout politique, visant à flatter des électorats sensibles aux discours de défiance envers les institutions médicales.

Face à cette polémique, l’OMS a réagi fermement le 24 septembre 2025. Elle a rappelé qu’aucun lien n’existe entre paracétamol et autisme, ni entre vaccins infantiles et ce trouble. Depuis 1999, les experts indépendants mandatés par l’organisation confirment que ni le thiomersal, ni l’aluminium contenus dans certains vaccins, ni l’acétaminophène ne provoquent de troubles neurodéveloppementaux. L’OMS rappelle aussi que les calendriers vaccinaux, issus de protocoles rigoureux, ont permis de sauver 154 millions de vies en cinquante ans.

Dans ce brouhaha politico-médical, 62 millions de personnes dans le monde vivent avec un trouble du spectre autistique. Les causes en restent complexes et multifactorielles, mêlant génétique, environnement et facteurs encore mal maîtrisés. On déplore que de telles déclarations, qui détournent l’attention publique en 
désignant de faux coupables, ne rendent service ni aux malades ni à la recherche.

Pour conclure, et en brandissant des hypothèses non vérifiées comme des vérités établies, Trump et Kennedy Jr. prennent le risque de discréditer les autorités sanitaires et de brouiller le message scientifique. La médecine exige patience, rigueur et humilité devant des questions aussi complexes que l’autisme.

Source : PharmaNEWS